Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Las Vegas

AVANT DE LIRE CET ARTICLE, n’hésitez pas à retourner sur l’article sur San Francisco ! J’avais oublié de mentionner l’étonnant Intimacy – cuddling workshop auquel j’ai eu la chance d’assister là-bas… (!)

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Dur réveil à 5h30 du matin, derniers rangements de bagages, dernières frayeurs (OU SONT LES CLEFS DE LA BAGNOLE?!!!!!), on est partis. Prochaine et dernière destination avant notre retour, Las Vegas, Nevada.

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(Ci-dessus : arrêt petit-déj sur la route, au milieu de nulle part… Population typique)

La route directe étant coupée en hiver, nous avons du faire un grand détour par le sud. D’autre part, au lieu des six heures de routes annoncées par Mappy, nous restons en réalité TREIZE HEURES dans la voiture (pauses comprises). On décolle à 7h15, avec deux heures de retard, inutile de vous décrire mon humeur. Surtout que la route nous avait été vantée comme la plus inintéressante du monde – l’idée de passer ma journée sur une route à tuer un clown était pas ultra-fun. Pourtant, peu à peu, j’ai été forcée de donner tort à tous ces américains qui ne savent rien admirer. Le voyage de San Francisco à Las Vegas a été une des plus belles des routes que j’ai faites pendant ce trip. C’est 80% de désert, mais un désert désespérément cinématique, désespérément Wendersien, le genre de paysages que j’attends depuis qu’on m’a annoncé que je me cassais au pays des hamburgers. Les routes droites, à perte de vue, le vide à gauche, le vide à droite. Puis les montagnes, rouges, les arbres secs et la caillasse, au loin les montagnes où se côtoient l’ocre originel et les sommets enneigés – Paris, Texas. Le soleil brûlant sur la tôle de la voiture, balayant du ciel tout nuage, à perte de vue pas une ombre, pas une âme. Que des camions et des vaches, de temps en temps. Les pubs toutes les demi-heures pour des fast-food / motels cradingues – Bagdad café. La nuit tombe.

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On tombe en chemin sur un resto paumé en plein milieu du désert – Peggy Sue’s 50s restaurant / dinosaur restaurant. Un drôle de concept qui allie statues de dinosaures à l’extérieur et ambiance fifties à l’intérieur, avec serveuses en petites robes – tabliers à dentelles et Marylins à tous les coins. Vous voyez pas le rapport, moi non plus, c’est pas grave. On ne commande rien mais la simple visite vaut le détour, tant pour le décor que pour les clients avinés.

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Peu à peu des lumières scintillent au loin, puis se rapprochent, Nevada nous voici. Les premières couleurs de Las Vegas sont ce qu’elles m’étaient promises : un Time Square à taille cityesque, le festival du too much, la Tour Eiffel qui côtoie le Sphinx et l’épée géante Excalibur.

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Il fait très chaud le jour (relativement à la saison), très froid la nuit. Nous profitons une fois de plus des points hôtel du père de Khari pour nous offrir deux nuits hors de Couchsurfing. Nos jambes n’en pouvant plus de rester immobiles, on part à la recherche dudit hôtel. S’orienter à Vegas est un désastre sans nom, et on ne trouve l’endroit qu’après avoir tourné pendant une demi-heure. On est tous les deux claqués, affamés et très irritables. On marche une autre demi-heure à travers un centre commercial de luxe où se côtoient minettes en talons et vieilles poules surmaquillées, et au moment où ma patience est prête à rendre l’âme, on arrive enfin. Passées les formalités, et l’erreur d’ascenseur (l’un sert jusqu’aux trente premiers étages, l’autre les trente-cinq derniers, du délire), on atteint enfin la porte de la chambre.

Ce n’est pas une chambre. C’est un appart ultra-moderne. En plus d’une chambre à un lit qui pourrait contenir une famille d’obèses, on a à disposition un living-room avec rétroprojecteur de cinq mètres sur trois, une cuisine américaine avec poêles, casseroles, couverts, machine à café et café, mixeur, récipients, carafe, verres, bols, tasses, assiettes et j’en passe, une immense salle de bain qui au lieu de baignoire, contient un JACUZZI. Inutile de préciser qu’en plus de l’écran géant qui se déploie à volonté sur la baie vitrée offrant la vue sur la ville – master TV étant le maître des américains – chaque pièce est équipée d’un écran plat supplémentaire, toilettes comprises (fun fact, elles sont également équipées du téléphone).

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L’hôtel est situé dans une espèce de grand centre commercial dont les magasins sont transformés en châteaux exotiques de pacotille, le plafond est un faux ciel parsemé de nuages, les serveurs des restaurants à thèmes sont tous déguisés. Tous les soirs se jouent des spectacles dans les nombreuses salles du complexe. On n’y dort jamais. Même les touristes sont en représentation, les demoiselles botoxées, peintes, encorcetées, juchées sur des talons de la moitié de leur taille, ne me surprennent même plus tant leur nombre est élevé. J’ai croisé des gens normaux, oui, oui, ils sont juste un peu la minorité visible et du coup, attirent le regard.

Lundi soir on rencontre la tante de Khari qui nous emmène voir un « variety show », l’attraction ultra-populaire du mini centre-ville. C’est une présentation de petits numéros de cirque de très bonne qualité, et je m’émerveille à nouveau des clowns, jongleurs et magiciens. Le dernier numéro du show est plus que prometteur : deux acrobates en patins à roulettes sur un trampoline, un jeu très beau, très beau, très dangereux. La danseuse tourne vite, vite, de plus en plus vite dans les bras de son cavalier dont le corps se perd dans la mousseline du tutu, tourne haut, puis bas, sa tête virevolte sa tête heurte le bord du trampoline son corps s’écrase, rebondit une fois et s’affale, et le public pousse un soupir de stupeur et les acrobates sortent de scène en tombant à nouveau et les deux filets de rouge sur le bord blanc du trampoline et dans l’oreille de la jeune fille inconsciente – Ladies and gentlemen, le spectacle est fini.

Première fois de ma vie que je vois un acrobate se fracasser le crâne. Le public est resté muet de stupeur pendant quelques minutes, mais bien vite, tout est rentré dans l’ordre et les gens sortent tout contents du bon spectacle dont ils se sont régalés.

Le jour d’après on s’attarde à découvrir le Vegas dont Wanda nous avait parlé. Las Vegas, c’est un grand boulevard, autour duquel le paysage immobile et aride semble entourer la ville d’une prison de vide. En remontant la rue principale tu serpentes dans l’ultra-clinquant, le fourmillement des talons hauts et des cigares, le festival du factice, et au bout de tout ça – le rien, les montagnes, rouges, le sable et les arbres morts. De chaque côté du boulevard, les hôtels de luxe s’alignent les uns à la suite des autres, reliés par le train mythique qui s’arrête à chaque porte (5 dollars l’aller). Chaque hôtel est porteur d’un thème. Circus Circus, New-York New-York, Excalibur, Louxor, MGM, Bellagio, tous arborent leurs couleurs à l’intérieur et à l’extérieur. Circuler parmi eux est comme visiter un parc d’attractions géant.

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A l’intérieur de chaque bâtiment, bien sûr, les casinos sont les maîtres. Ils agressent le regard par le trop-plein de sollicitations visuelles ; les lumières clignotent sans arrêt et la musique de boîte de nuit jouée à pleins tubes toute la nuit prend les oreilles en otage. Les joueurs se partagent entre les tables de jeu à visage humain et les machines, aux bruits trop forts et aux couleurs trop vives. Certaines d’entre elles ressemblent à des grosses game-boy pour adultes, même les jeux reprennent les Disney / Harry Potter / n’importe quel machin d’animation. Ça s’excite, ça miaule, ça boit, ça fume, fume, fume (tabac autorisé dans les casinos). Les profils des plus accros sont marqués profondément et certains d’entre eux ont perdu les traits de la raison. Certains sont là depuis 8, 9h du matin, et resteront jusqu’à la fermeture, le cul vissé sur les tabourets de cuir et le doigt roulant sur les touches des machines. Chaque hôtel a sa propre attraction gratuite. Le dernier soir, on assiste à un spectacle de cirque à Circus Circus, mais on prend aussi le temps d’admirer la danse de l’immense fontaine du Bellagio (qui vaut vraiment le coup d’oeil) et la démonstration des pirates de Treasure Island. On n’oublie pas bien sûr d’admirer la fausse tour Eiffel construite au-dessus d’un restaurant de « fruits de mer et petits pains ». Les hôtels comprennent aussi tous, plus ou moins, de grand centres commerciaux de luxe. L’occasion d’admirer les dernières vitrines de Chanel et Gucci.

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Ci-dessus, la danse des fontaines du Bellagio.

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Ci-dessous, les photos de l’hôtel New-York New-York, de l’extérieur…

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…Et de l’intérieur !

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Ci-dessous, l’hôtel Excalibur.

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Ci-dessous, l’hôtel Louxor.

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Le 17 au matin, après avoir fait le tour des derniers hôtels, on prend une dernière fois la route pour retrouver Los Angeles, où notre avion de retour décollera le matin suivant. A nouveau, la route serpente parmi les montagnes rouges et le ciel bleu étincelant. Vers midi, on s’octroie une pause. Le soleil tape sur la tôle de la voiture et un grand vent souffle au dehors. L’endroit est misérable. Une station service miteuse, un vendeur de bouffe et un terrible fast food grec, où Khari commande un milk shake pour se défaire de la chaleur, font office de centre-ville. Un peu plus loin, un quartier de mobile-homes garés sur le sol sableux. Une fois de plus, je suis dans un film. Même les tronches des gens sont signés Wim Wenders.

Voilà.

La fin du périple. Ce sera ensuite la dernière nuit à LA, les six heures d’avion, l’arrivée dans l’hiver glacial de Boston.

Et le retour à Wesleyan.

La suite au prochain numéro.

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – San Francisco

 Après ces trois heures de route sous la pluie, nous arrivons à San Francisco. Mes premières impressions de la ville sont celles d’une cité cossue, aux maisons colorées et extrêmement vallonnée. Je suis interpellée par ce détail d’architecture qui aligne dans une même rue des maisons de dimensions parfaitement similaires, mais chacune très différente de sa voisine, de couleur et de forme. Ça me rappelle les gâteaux dégueulasses dont les gens raffolaient quand j’étais en Angleterre (et que je retrouve ici), trop pleins de détails, trop pleins de crème, trop pleins de couleurs chimiques. Cf photo ci-dessous.

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Sans m’en rendre compte je me retrouve en moins de deux sur le mythique Golden Gate Bridge que je traverse toute excitée (OUI j’ai honte, mais ma première pensée, ç’a été le générique de Charmed). A nouveau le coucher du soleil m’émerveille. La Californie a les plus beaux soirs du monde.

Cette fois, le plan c’est de rester chez une amie de la mère de Khari, Wanda (ci-dessous). Avant de rejoindre sa maison nous poussons le trajet jusqu’à un bled paumé pour trouver un énième magasin discount VANS (Khari est à la recherche d’une paire de Vans ultra-spécifique et je crois qu’on a écrémé tous les magasins de Californie, je pensais pas que c’était très intéressant à souligner mais à ce point ça devient un élément clé du voyage – les garçons sont AUSSI superficiels que les filles en matière de look). Puis, enfin, on est repartis vers la maison de Wanda.

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La famille habite dans la maison de fonction jouxtant l’école de fille que Wanda dirige. En fait de maison, il s’agit plutôt d’un véritable palace de trois étages aux plafonds dignes de cathédrales. Les deux garçons de la famille, David et Jonathan, respectivement huit et cinq ans, disposent en plus de leur chambre d’un étage à eux tout seuls, dont la pièce principale (qui remplit l’espace d’environ trois pièces de la maison à Couchey) est remplie à ras-bord de jouets. Ils ne pourraient occuper leur vie d’un dixième de ces jeux.

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Dès notre arrivée, Wanda nous accueille d’un immense sourire. Elle nous invite à considérer sa maison comme la nôtre, et ce qui pour certains est une simple formule de politesse prend tout son sens dans sa bouche. Nous disposons de notre propre chambre (de la taille du salon de Boulogne) + salle de bain, nous avons libre accès à toute la nourriture de la maison (son frigo de deux mètres de haut sur un mètre de large et un mètre de fond pourrait nourrir une armée pendant un mois) – nous sommes les rois.

Wanda et Robert sont d’une générosité sans limite. Quarante dollars glissés ici et là pour « aller manger quelque part », cent-dix dollars dans la veste de Khari, à la fin du voyage, « pour nous pourvoir un peu d’argent de poche », etc, etc, etc. Vous l’aurez compris, l’argent n’est pas vraiment un des problèmes de la famille. Mais leur générosité s’étend aussi à l’intérêt qu’ils nous portent. Plusieurs soirs, nous nous épanchons en conversations du plus grand intérêt. Wanda est aussi passionnée de voyages, et très francophile (elle parle un excellent français) : elle me parle avec délice de Paris, dont elle apprécie la beauté, la finesse artistique, la culture. Leur savoir m’impressionne. Robert se révèle être un fan de Dumas (il a donné à son fils « Edmond » en second prénom en l’honneur du personnage du Comte de Monte-Cristo). Elle est diplômée de Columbia, il est passé par Stanford et Harvard. Des petits cerveaux, quoi.

Bien qu’aucun des époux ne se préoccupe des tâches ménagères, chaque mètre carré de la maison reluit. Wanda ne conduit pas, ne cuisine pas, ne fait ni la vaisselle, ni la lessive, ni le ménage. Elle ne fait pas les courses qu’elle commande en ligne et qui arrivent directement devant sa porte – courses qui ne servent qu’aux invités, car la famille commande généralement depuis les restaurants quand ils ont faim. Les enfants sont pris en charge par leur nounou / femme de ménage / membre de la famille qui comme une fée du logis s’occupe d’effacer tout désagrément de la maison. La joie de vivre semble être le mot d’ordre de la famille, qui profite de la vie sous tous ses aspects. Tous deux obèses, les parents ne se privent pour autant pas de repas fastueux (la présence de deux tapis de course intérieurs efface la culpabilité), de sorties et de livres. Ici, on voit les choses en grand. Et on parle fort, et on rit fort, et on embrasse fort.

Le samedi, c’est l’anniversaire du petit Jonathan qui fête ses cinq ans. On est tout naturellement invités à la « petite » fête (famille, nounou, + un seul ami et sa maman) précédant la grande (la chouille avec tous les petits poteaux). Le programme de la « petite » fête est un déjeuner dans un excellent resto chinois, autrement dit, deux heures à manger et parler entre adultes (idéal pour un enfant de cinq ans, n’est-ce pas?). Wanda commande deux plats pour chacun au cas où on manquerait, et bien sûr, c’est elle qui régale. Les enfants mangent trois cuillères de leur riz et commencent à trépigner. Jonathan est le roi. Tout le monde est aux petits soins, il se voit offrir une 1001ème paire de jeux de lego qu’il aura oublié dans quelques jours. Bref, c’est la teuf.

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Voilà pour la vie de famille. Pour ce qui est de la ville, San Francisco est définitivement celle dans laquelle je me verrais le mieux vivre. Bien plus agréable que Los Angeles. Tout est à moins de dix minutes en voiture, une demi-heure si le trajet implique de traverser le Golden Gate Bridge ; il est bien plus aisé de se garer car leur politique de transports en commun est beaucoup plus développée ; la ville est magnifique malgré ses immenses montées-descentes et donne un accès direct à l’océan… Bref, ne serait-ce le thermomètre qui reste très souvent dramatiquement bas, je me verrais assez bien migrer là-bas. On se promène longuement sur Fischerman wharf, un mini centre-ville construit autour du port où l’histoire des pêcheurs est racontée sous toutes ses formes : musées, animations pour les enfants, restaurants, boutiques de souvenirs… On y délecte des plaisirs simples et enfantins, comme ces énormes otaries qui se plaisent à flâner sur la jetée n°39 ou ces reconstitutions de bateaux anciens, perdus par les ans.

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On décide finalement de retourner voir les arbres rouges dans le parc naturel au nord du Golden Gate Bridge. Ces immenses troncs, multi-centenaires, dont le gigantisme empêche qu’on les photographie correctement. Une pancarte à l’entrée explique le découpage d’une tranche de tronc pour mesurer l’âge exact des arbres : celui-ci a été planté aux environs des années 950. Pauvre mortels que nous sommes…

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Un autre jour, on se perd au milieu de Japan Town où on nous vante les meilleurs sushis / mangas du pays. Les petites échoppes de vaisselle de porcelaine sont à tous les coins de rue (Maman, tu frétillerais comme un petit poisson), jouxtant les librairies et les vendeurs de babioles (et de produits des plus surprenants, cf photo ci-dessous).

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 Un soir, on participe à un délirant « Workshop – cuddling and intimacy », en bref un atelier de câlins. Mes copines françaises avaient à l’époque hébergé un couple de couchsurfers de San Francisco qu’elles avaient A-DO-RE, et je les avais du coup contacté au cas où on n’ait pas de maison dans notre voyage au nord. Même si, finalement, on n’a pas eu besoin d’habiter chez eux, j’étais toujours intéressée par l’idée de les rencontrer. Travis, le mec, m’invite donc à venir avec Khari à son workshop. N’ayant pas la moindre idée de ce qu’est un workshop, je me dis que ça va probablement consister à d’intéressantes discussions sur l’intimité, les relations aux autres et à soi-même, bref un truc potentiellement chouette. Khari, lui, n’est pas franchement emballé, mais comme il le dit lui-même, « au pire ça nous fera des histoires à raconter » ! On se pointe donc en début de soirée dans une petite rue sombre où se trouve l’endroit. Suivant les flèches griffonnées sur des feuilles de papier, on descend les escaliers vers le caveau où a lieu l’atelier. Travis nous accueille chaleureusement. Il est exactement la représentation que je m’en étais faite. Hippie des années 2000, cheveux longs, torse et pieds nu, sarouel noué autour de la taille, il fait des exercices physiques sur les tapis qui recouvrent le sol. On échange quelques mots en attendant les autres participants. La salle est aménagée avec des canapés, des tapis et des coussins genre indien-baba-cool, lumières tamisées et tout le toutim. Je croise plusieurs fois le regard plus que sceptique de Khari. Les gens arrivent, on s’assied en rond, on commence. Le groupe est composé de sept personnes : Travis, Khari et moi, deux filles wawash qui semblent très peu sûres d’elles, un tout petit bonhomme aux traits d’Asie centrale, et un espèce de dingo très propre sur lui, qui arrive en retard et s’assied comme un prince arrivant sur son trône, parlant tout le temps – déclamant des grandes phrases avec beaucoup de mots mais pas beaucoup d’intérêt. Mortel. Le workshop commence par une séance de méditation. C’est long et très ennuyeux. La deuxième étape est un « atelier » pendant lequel un « receveur » est censé rester allongé sur le sol pendant que le « donneur » est censé toucher le corps du receveur et observer les réactions, tout en essayant de créer un sentiment d’intimité avec ce dernier. Évidemment je me retrouve avec le dingo. Je vous explique pas le malaise. Bref, après le temps de « l’exploration » (par dessus mon manteau / écharpe / triple pull), vient le temps du bavardage. Les discussions qui s’en suivent son d’une immense platitude tournant autour de « il faut être plus ouvert aux autres avec son corps – faire des câlins c’est cool – réappropriez vous votre corps et apprenez à être intime avec vous-même – blablabla ». J’essaye de relever un peu le niveau, mais si Travis semble intéressé il est visiblement le seul. On retombe globalement dans le même tissus de généralités. Khari est de plus en plus agacé par l’ambiance post-hippie-légèrement-débilos. A la fin du workshop, je ne me sens pas spécialement plus à l’aise avec mon corps ou avec celui des autres que je n’étais en arrivant, je ne me sens pas de désir d’embrasser la terre entière ni de poursuivre avec fougue ces discussions sur comment retrouver une intimité avec moi-même. Mais bon, c’était rigolo. Avant de repartir on discute un peu avec Travis qui semble de loin le plus intelligent. Il se fait pas mal d’argent avec ses petits workshops, comme quoi la solitude des humains est encore ce qui les pousse à sortir leur porte-feuille. Je découvre aussi avec stupeur qu’il a définitivement renoncé au tee-shirt. Il passe sa vie entière torse nu. Hiver compris. J’en ai froid pour lui. Au moins, on aura des histoires à raconter.

Un autre jour, on explore également le golden gate park, notamment la tour donnant accès à une vue de la ville à 360°, puis le jardin japonais, puis l’espace des statues… On a malheureusement raté le conservatoire des fleurs mais le temps manquait… On ne peut pas tout voir. San Francisco, je reviendrai !…

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Santa Cruz

Black days. Peu de choses intéressantes pour le public ces derniers jours, j’en ai peur. Nous avons eu certains problème liés à la dépression d’un de nos amis de classe avec lequel on a traîné et qui nous a hébergé chez lui une nuit. Durs moments que faire face à un cerveau tout plein de court-circuits, de voir un garçon vif et intelligent devenir l’ombre lobotomisée de ce qu’il est. Je ne m’étendrai pas.

Voici quelques jours qu’a commencé la deuxième partie de notre voyage, la remontée vers le nord californien.

Nous avons quitté Los Angeles l’après-midi du 5. Peu à peu le paysage change et le thermomètre baisse : nous avons perdu 20 degrés Fahrenheit entre LA et Santa Cruz. Après un trajet ultra-dangereux sous une pluie battante (la voiture de location avait le léger inconvénient de posséder des essuie-glaces inopérants), nous nous octroyons une nuit d’hôtel sur la route de Santa Cruz. Nous repartons le lendemain après une petite conversation furax avec le loueur de voiture qui s’excuse platement. A nouveau, les paysages sont à eux seuls un spectacle. J’y retrouve d’ailleurs des paysages très similaires à la Bourgogne. C’est plein de vallons, c’est vert, c’est boisé, et on note une étrange cohabitation entre conifères et palmiers. L’accumulation des ranchs et la modification des tenues des badauds nous annonce qu’on s’enfonce dans l’Amérique des cow-boys et des sombreros (chemise à carreaux, santiags et chapeau large sont ici de mise). En arrivant dans Santa Cruz, les cow-boys font place aux skateurs / surfers. Les gens ici ne marchent pas, ils roulent en mâchant des chewing-gum.

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Nous rencontrons notre troisième couchsurfer, Tim. Tout juste rentré de quatre ans passés à enseigner l’anglais à l’étranger (Espagne, Belgique flamande, Amérique du Sud et Népal), ce trentenaire chaleureux nous accueille autour d’un thé en nous racontant son expérience de professeur voyageur, notamment l’immersion dans la culture népalaise. Malgré ces trois nuits assez éprouvantes pour le dos (il n’a pas de lit supplémentaire, nous dormons donc sur le sol), j’apprécie notre séjour chez Tim. Il est de loin le plus discret et agréable de nos hôtes. Toutes ses histoires me font rêver. Il est d’ailleurs en train d’écrire un livre pour les offrir à un plus grand nombre de curieux. J’ai hâte de le lire !

Ces quelques jours à Santa Cruz nous ont permis de nous poser un peu, pouvant enfin rester plus de 24h dans une même maison et sans se sentir obligés de la quitter le plus vite possible le matin. Nous en avons donc profité pour visiter les alentours, qui sont principalement profitables pour la beauté du paysage, davantage que pour la vie culturelle qui y est assez pauvre. Le 7 après-midi, nous avons descendu la route côtière vers Monterey Bay dans l’optique de visiter l’aquarium géant, ouvert au public. Le voyage en voiture est magnifique. Peu à peu, pendant que nous quittons Santa Cruz, les paysages se désertifient. Au loin les montagnes perdues dans la brume se confondent avec le ciel. Malheureusement pour nous, nous arrivons trop tard pour visiter l’aquarium, dont l’exploration requiert 2h30 ; on en remet donc la découverte à plus tard, lorsque nous redescendrons de San Francisco. Cependant cette déception nous permet de découvrir la ville de Monterey Bay, genre de Carnac à l’américaine, blindé de commerces maritimes et de stores de babioles, très mignonne. Le coin est réputé pour toutes les missions chrétiennes qui s’y sont déroulées (d’où tous les « San machin »), et le commerce jésus-marie-et-cie marche du tonnerre (ci-dessous une photo d’un magasin de bonbons vendant des barres de chocolat Jésus – si c’est pas mythique…). La promenade le long de la côte est un égal régal pour les yeux.

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Le lendemain, on part dans la forêt à la recherche des énormes arbres rouges multicentenaires. L’avancée sous l’ombre de ces géants nous plongent dans une atmosphère glaciale. Je suis surprise par leurs troncs, tous atteints par semble-t-il la même maladie de vieillesse qui creuse des tranchées dans leur écorce. Ou bien est-ce l’érosion ? En tout cas, le froid nous tire vite hors des bois. La fin de la journée se déroule sur le boardwalk de Santa Cruz, où une lumière magnifique accompagne la tombée du soir. Les ciels de Californie sont décidément exceptionnels.

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Voici alors déjà sonné le glas du départ. Le 9 au matin nous faisons nos adieux à Tim en le remerciant vivement pour son accueil (et son tapis). Avant de faire route vers San Francisco, nous faisons escale dans un parc appartenant à une organisation bouddhiste (land of the medicine buddha). Le temps nettement rafraîchi, je me sens comme dans un matin de novembre bourguignon. Les mêmes arbres géants jalonnent les chemins pentus de la propriété, où les temples et les salles de prières se perdent dans la forêt. Même la végétation est pleine de surprises, comme ces petites statues cachées dans les troncs et dans les herbes. J’ai vraiment une passion pour les lieux de culte. Ce sont des havres de paix. Les temples sont ornés d’œuvres d’art splendides. Ci-dessous, l’énorme motif coloré (plus d’un mètre vingt de large) est fait de sable teint. Une merveille.

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Ainsi s’achève notre remontée de la côte Ouest de États-Unis vers San Francisco. Par trois heures de route sous une pluie battante et dans les voitures embouteillées, bien loin du soleil amical du Sud.

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Malibu – 04/01



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Réveillés ce matin par le soleil entrant par la fenêtre, Khari et moi ouvrons les yeux sur ce qui est jusque là un des plus beaux jours de notre voyage. Tout pimpant, Chris fraîchement levé nous propose un tour en moto sur les montagnes autour de sa maison. En sortant à l’extérieur, je découvre ce nouvel environnement que la nuit ne m’avait pas permis de savourer la veille. Il fait un temps de début juin, le soleil ne déchante pas, la pierre est ocre et mangée de cactus (enfin ! Mes cactus !).

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Ci-dessus, 1.Chris – 2. Khari.

Veste en cuir et casque enfilés, je grimpe sur un de ses deux joujoux et nous voilà partis. Je suis bouleversée par la beauté de ce coin. Ça ressemble beaucoup au Sud de la France ou à la Corse. Les montagnes tombent à pic dans des vagues bleu sombre sur lequel le soleil dessine des milliers de paillettes. Les maisons luxueuses surplombent l’océan, perdues dans la nature. Cette première expérience en moto me fait aussi comprendre la passion que certains peuvent en avoir. Plus rapide et moins fatigant que le vélo, elle donne bien plus qu’en bagnole la sensation de réellement faire partie de la nature. Plus cette incroyable impression de liberté.

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En laissant Khari prendre place à ma suite sur la moto, on croise Steven, le voisin de Chris, qui nous prend tous en photo (très direct quand je me hasarde à lui montrer comment marche mon appareil – « je sais, je suis photographe ! » – oh, pardon). Il se trouve que le type est non seulement photographe, mais aussi producteur de séries télé et autres kiff cinématographiques. L’occasion d’une super conversation pendant que Chris et Khari repartent dans la montagne. « Non, le cinéma, c’est pas difficile d’y entrer. Puisque c’est ta passion tu vas tout faire pour y arriver et tu vas y arriver. Le plus dur c’est de vraiment le vouloir ». Haha. Californie bonjouuuuuuuur !

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Au retour des garçons, Chris nous emmène manger dans un petit resto de poissons où je l’interroge sur son passé d’addict. Incroyable parcours d’un homme ayant consommé en excès alcool, hasch et cocaïne pendant plus de quinze ans. Caricature de dealer, voleur, menteur, tout en combinant les jobs pour payer sa came, fuyant sa famille et accumulant les filles ; aujourd’hui clean depuis vingt ans et prêchant la bonne parole auprès des plus jeunes. Heureux propriétaire de cinq maisons à Hawaï qu’il loue, heureux locataire de cet appartement idéalement placé pour seulement 1500 dollars par mois (certaines maisons ici peuvent aller jusqu’à 20 000 dollars par mois). Chris est un type adorable dès qu’il s’agit de partager son expérience, même si en dehors de ça, la vie de deux gamins en vadrouille, ça l’intéresse assez peu.

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Après le repas, lissant son bouc gris très travaillé, il nous propose de nous montrer quelques uns de ses endroits préférés. On marche vers une jetée où les pêcheurs se dorent au soleil ; au loin, on aperçoit la côte de Venice Beach où on était la veille même.

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Puis on découvre un petit bijou de plage où se côtoient les pélicans et cette typique espèce d’oiseau très rigolo : tout petit, le bec fin et immense creusant dans le sable comme un marteau piqueur à la recherche de nourriture juteuse. La plage est en contrebas d’un chemin abrupt nous offrant le régal d’un paysage sauvage cinématique. Un couple en tenue de mariage descend pour immortaliser leur meilleur jour de leur vie ; photographes et mannequins se succèdent sur le sable chaud. On finit la promenade en serpentant en voiture dans la montagne, je me la pète en débardeur et lunettes de soleil. GOD BLESS WINTER.

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Contrairement à ce qu’on pensait, Chris ne peut pas nous héberger la nuit suivante, ce qui nous pousse à retourner downtown. A la fin de la journée, nous quittons donc notre hôte jovial pour retourner à Los Angeles même où un de nos amis de classe nous accueille pour la nuit.

Ci-dessous, la plage (+ tout en bas, le type d’énergumène qu’on y trouve).

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Los Angeles – 03/01

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Ci-dessus, la vue des maisons devant l’appart de Tosi.

Voici venu le dernier jour de notre séjour à Los Angeles. Lassés de Chris Tosi, notre couchsurfer, qui continue son comportement chelou de je-fais-comme-si-vous-n’existiez-pas tout en imposant sa présence en permanence dans la salle où l’on dort, et avides de découvrir de nouvelles perspectives, on décide en effet de lever le camp le soir même. Le prochain arrêt sera Malibu, à seulement 30 minutes de voiture de Marina del Rey, où un nouveau couchsurfer nous hébergera pour une nuit. Notre rituel petit déj / écriture est de moins en moins rigolo, vu que les cambodgiennes qui tiennent la place sont visiblement de plus en plus stressées et leur niveau de cordialité baisse sensiblement. Aussi sommes nous d’autant plus content de changer de zone, et de rituels matinaux.

Comme les très courtes nuits que nous impose Tosi nous laissent claqués (on rentre toujours tard pour l’éviter, et il se lève aux aurores sans vraiment tenter la discrétion), on profite de ce dernier jour pour glander à la plage de Venice Beach. Ma première balade pieds nus dans la sable de l’année – 3 janvier.

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Le soleil brille encore, il doit faire autour de 20 degrés. Impossible de ne pas s’arrêter et s’allonger dans le sable en regardant le soleil illuminer les vagues de l’Océan. C’est trop bon. Bien sûr, il ne faut pas trop regarder en bordure de la plage, où des tonnes de SDF s’entassent toujours quelques mètres des touristes friqués. La chaleur aide à fermer les yeux sur la misère.

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On se promène donc le long de la baie, parmi les palmiers, les skateurs et les fous, flânant entre la plage et les échoppes. Je croise pour la deuxième fois depuis hier ces deux Sénégalais vendeurs de babioles rastas ; on papote en français (ils sont de Paris, 18ème), on se marre, c’est fun. Je ne cesse également d’admirer les nombreux graffitis qui ornent les murs de LA. Loin des simples tags que l’on peut trouver chez nous, ce sont de véritables oeuvres d’art qui ornent les murs de la ville (photo ci-dessous).

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Voyant le soir et la fraîcheur tomber, on abandonne les bords de Venice et on reprend la route.

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Malibu, nous voilà. J’ai peine à croire que je pars là-bas. Dans ma tête, Malibu c’est Pamela Anderson, le summum du cliché américain et de la superficialité, la plage, les cocktails et les filles botoxées (il paraît qu’en Amérique Venice Beach aussi a sa réputation, mais j’en avais jamais entendu parler avant). On arrive dans la nuit devant un immeuble sombre par une route de montagne. Le temps de monter les valises au deuxième étage, le second couchsurfer de notre voyage, Chris Kelly (notre deuxième Chris) nous ouvre la porte de son appartement avec un sourire aussi énorme que les yeux bleus qui mangent littéralement son visage. Ça promet une autre ambiance que chez Tosi… Le type est un quinqua, ancien alcoolique et drug addict, fan de moto et de musique (sa bibliothèque est IMPRESSIONNANTE), actif voyageur et couchsurfer depuis cinq ans. Sobre depuis une vingtaine d’années, il vit en louant des propriétés acquises préalablement à Hawaï et en faisant des interventions dans les écoles pour parler des addictions. Il parle beaucoup, rigole encore plus – un bonheur d’hôte (ci-dessous).

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Il nous propose de sortir écouter un guitariste de blues – très tentant, on hésite, mais contents de se retrouver au calme, on reste finalement tous les deux dans l’appartement et le sommeil nous prend vite.

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Los Angeles – 02/01

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Nous voici à LA depuis quelques jours et déjà on y a nos habitudes, comme le petit déj dans notre mini donuts king, le meilleur rapport qualité prix qu’on ait trouvé dans la ville ; deux heures où l’on s’astreint à écrire et décrire notre voyage (pour l’instant on s’y tient, chaque jour a sa page noircie).

En sortant de là le soleil nous lèche la peau : le temps est meilleur chaque jour, on doit friser les 20 – 21°. Sur les conseils de Chris (le couchsurfer relou), la journée se passera sur Venice Boardwalk, la route longeant la plage derrière son appartement. Là où on s’était baladés la première nuit (avec le type en santiags / lunettes noires en train de se brosser les dents sur son vélo). Apparemment, de jour, ça bouge un max.

Le matin, on explore quelque peu en voiture une autre partie de la ville, on flâne au soleil, l’occasion de quelques clichés pris en vol :

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Puis on rejoint les abords de Marina del Rey, où on se gare dans une rue déserte. On marche quelques minutes le long des maisons blanchies par le soleil.

Soudain, derrière un tournant, le spectacle.

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Le boardwalk de jour est l’asile des fous et le paradis du loufoque. Ça grouille d’un petit monde aux habits carnavalesques ; mon cow-boy à brosse à dents me semble alors bien banal. Des deux côtés de la rue, les boutiques en dur font face aux stands mobiles où dreadeux et hippies se partagent le marché. On croise des dealers de weed toutes les quatre maisons, les yeux plus rouges que jamais (ici, c’est légal, pour ceux qui l’ignoraient – comme moi au départ qui bêtement m’extasiai devant l’audace de vanter leur marchandise en public et à voix haute). De l’autre côté de la rue, la plage et l’Océan à perte de vue. Les mouettes se baladent un peu partout et s’éclatent entre les palmiers.

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Comme tout ado californien qui se respecte, tous les natifs se baladent en skate, la mèche au vent. Il y a d’ailleurs un skate park sur la plage qui attire l’œil et les appareils photos des touristes. Tout le monde porte au moins un t-shirt / chapeau / bracelet / tatouage « Republic of California », « Califorever », ou des insignes rastas (les enseignes jamaïcaines sont d’ailleurs en sur représentation ici). De même, je suis très déçue de constater que les cauris se vendent ici partout, j’en perds toute mon originalité. Qu’importe.

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On passe l’après-midi à flâner sur cette rue sans fin à profiter du soleil jusqu’à sa dernière goutte. La nuit tombe incroyablement vite ici et avec elle la température, aussi le froid nous pousse à nouveau dans notre burrito miteux.

Après cette délicieuse flânerie, la soirée restera un monument dans nos mémoires. En bons jeunes fauchés, pas moyen de se faire un ciné (comptez 12 à 14 dollars ici…), on décide donc de louer un DVD à la première borne venue et de le mater tranquille dans la voiture. En effet la perspective de retourner chez Chris Tosi avant qu’il dorme ne nous enchante pas vraiment. On s’arrête donc devant une station service quelconque où se trouve un distributeur de DVD. Je sors de la voiture pour aller regarder les titres.

…Khari claque la porte.

Et se met à insulter la terre entière. Il vient d’enfermer les clés à l’intérieur de la voiture. Où se trouve accessoirement toute ma vie : mon porte-feuille, mon téléphone – mon MANTEAU. Impossible d’ouvrir la voiture, impossible de faire quoi que ce soit. On est coincés dans le trou du cul du monde. Je me les gèle.

J’entre dans le petit shop, sans trop m’inquiéter pour l’instant. Khari appelle AAA, la compagnie de dépannage qui résout ce genre de problème pour pas un rond. Tout ira bien, au pire on poireautera une heure, c’est pas un drame, il est encore tôt. Sauf qu’ils ne répondent pas. 10 minutes. 15 minutes. 20 minutes. Les mecs du magasins sont assez gentils pour ne pas nous virer, thank God, je ne survivrais pas au froid de l’extérieur. Je m’assieds sur le bord d’un étalage de gâteaux gras presque vide, je soupire. Les SDF se succèdent devant mes yeux, plus ou moins sympas, plus ou moins tarés. Pour passer le temps j’essaye d’apprendre par cœur la composition et le nombre de calories des produits qui passent devant mes yeux. Pas un bouquin ne traîne dans la boutique. Je regarde vaguement les magazines porno exposés en vitrine, mais ça n’a jamais vraiment captivé mon attention, et au bout de 15 secondes je m’ennuie à nouveau.

Après une demi-heure d’attente au téléphone, le caissier nous conseille d’appeler une compagnie privée de dépannage qui peut soi-disant ouvrir n’importe quel verrou, même si ce sera loin d’être gratuit (il prévoit entre 50 et 60 dollars). On appelle les bonshommes. Ils nous annoncent 15 dollars pour le déplacement et entre 35 et 60 dollars pour le dépannage ; ça fait mal mais on n’a pas vraiment le choix. Après une heure d’attente au lieu des 15 minutes annoncées, le type se pointe et fait son devis. Il nous annonce un total de… 200 dollars. DEUX CENTS DOLLARS. Gloups. Khari angoisse à mort et appelle le manager en gueulant, disant que ce n’était pas le deal, etc etc. Quant à moi j’explique au technicien que de toute façon, on n’a pas un rond et qu’on ne peut simplement pas payer ce qu’il demande. J’en rajoute côté face larmoyante et il finit par me demander combien on pourrait mettre. Bref. Au bout d’une autre demi-heure de négociations, de coups de fils à n’en plus finir, de cris et de larmes, je finis par lui dire qu’on ne peut pas mettre plus de 80 dollars au total (en me disant qu’il n’accepterai jamais moins). ET IL ACCEPTE. Et il ouvre la bagnole pour 80 fucking dollars.

Je suis outrée. J’aurais du dire 60, ou même 50, ou n’importe quoi. La totalité de l’effort lui a coûté cinq minutes pour venir jusque là, 2 minutes pour faire semblant d’étudier la voiture, et 14 secondes pour l’ouvrir. Et cet enfoiré nous a fait payer 80 dollars au lieu de 200 (parce qu’on l’a emmerdé pendant un bout de temps). Ce qui signifie que ça ne lui coûte en réalité absolument rien et qu’on s’est fait sérieusement baiser malgré la baisse de prix.

Peu importe. Il est 22h, on est là depuis 18h45. J’ai les nerfs à vif.

On finit par louer ce stupide DVD qu’on regarde sur un parking dans une voiture glaciale, emmitouflés dans notre couverture achetée 6 dollars dans un marchand de trucs d’occasion. Et puis on rentre. Un peu plus calmes. Heureux de clore cette soirée désastre.

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Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – San Diego – 01/01

Donc ce matin il est devenu de plus en plus clair que notre hôte est le plus ennuyeux couchsurfer du monde. Non pas qu’il soit méchant, simplement il s’en branle. Je crois que la personnalité de Khari ne va pas très bien avec la sienne et il ne cherche pas des masses la conversation ni avec lui ni avec moi, ce qui n’est guère encourageant pour faire copain-copain. Le plus tôt sera le mieux, on lève le camp avant 10h.

Puisqu’on est le premier jour de l’année (ce que j’ai tendance à oublier vu le temps), évidemment tous les sites intéressants sont probablement fermés. Aussi comme je fantasme sur le Sud Sud depuis un bout de temps, on décide de faire route vers San Diego. Dans ma tête San Diego c’est des gringos-à-sombreros à tous les coins de rue, le soleil tapant et les cactus (où diable ai-je pris l’idée qu’il y ait des cactus ? Mystère). Trop fun.

On se trouve d’abord un genre Dunkin’donut à prix mini et café maxi pour prendre le temps de décider où aller (en l’occurrence Donuts king, qui va devenir notre rituel matinal). La bouffe ici est incroyablement cheap pour la qualité – certes ce n’est pas du grand luxe mais on se serre pas la ceinture. Là bas, une fois de plus, les gens sont des personnages de films. Je prends des tonnes de photos, j’avale mon muffin, et on s’arrache.

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La route de San Diego, c’est la mort. Au début on essaye d’éviter l’autoroute pour trouver des chemins cool, mais on se rend vite compte qu’à ce train là on arrivera surement en début de soirée. Ce sera donc autoroute rasoir pour les 3 prochaines heures.

Quand nos jambes n’en peuvent vraiment plus, on s’arrête pour une promenade sur la plage. C’est pas la canicule mais le temps reste plus qu’agréable. Et puis je retrouve l’océan. Pas le mien, d’accord, mais quand même. C’est finalement pas bien différent de ce côté-ci du monde, à part les algues qui ressemblent à de gros spaghettis au lieu de nos feuilles gluantes vert-noir. Mais c’est la même odeur, la même couleur, la même douce température. Il paraît que de là on peut voir les baleines, des fois. Mais aujourd’hui ce ne seront que des marmots chamailleurs.

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On reprend la route.

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Quelques heures plus tard, nous voilà à San Diego. Que je rangerai dans mon top 10 des bleds les plus nazes. En fait de mini-ville américano-mexicaine telle que mon imagination me l’avait laissé espérer, elle ne ressemble qu’à la plus banale des villes de banlieue – immeubles gris sans charme, rues crado à perte de vue et burgerplaces à chaque tournant. On cherche désespérément la plage, or something, pour dégourdir nos jambes trop longtemps immobilisées. On finit par s’arrêter dès qu’on aperçoit un bout de mer – il est cinq heures et des poussières. On marche. Le soleil couchant derrière les nuages sépare le ciel en des traits de gris sombre et de feu. C’est magnifique. Sur le chemin des gosses obèses se courent après. L’océan se change peu à peu en lamelles dorées dans lesquelles les oiseaux gobent en vol eau et poissons. Le ciel change de couleur chaque seconde, et on court vers un pont pour ne pas manquer les dernières lueurs du soleil tombant sur l’eau.

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Une fois la nuit tombée, l’endroit ne présente plus beaucoup d’intérêt ; on repart donc à la recherche de quelque chose à manger. Pour mon malheur on tombe en chemin sur une fête foraine – j’avais oublié que les garçons restent toujours des mômes et évidemment je me laisse traîner là-dedans par Khari. Il me supplie pendant cent ans de monter avec lui dans ce Roller coaster et JE NE SAIS PAS POURQUOI je me laisse finalement convaincre. Inutile de préciser que ce fut le premier et le dernier de ma vie. J’ai cru que ma tête allait être arrachée de son socle et j’ai passé la minute à essayer de la rentrer dans mes épaules le plus fort possible. LA MORT.

Après ce stupide épisode on flâne encore dans le coin à touristes de San Diego. Les enseignes lumineuses clignotent partout et les bouibouis mexicains se partagent la vedette avec les asiats. Puis c’est le retour dans la nuit vers Marina del Rey. Je m’endors dans la voiture. Comme d’habitude.

Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Los Angeles – 31/12

  En ce dernier matin de 2012, le soleil chauffe doucement les rues de Marina del Rey. Rien ne sent la Saint Sylvestre, je me dore la pilule en sweet.

On étudie les plans pour la journée ; je veux voir Hollywood boulevard, nous voilà donc partis. A Los Angeles, la plus petite course dure entre 30 et 40 minutes, en cas de trafic ultra fluide (ce qui est super rare). Chaque nouvelle destination implique donc une balade plus ou moins longue et plus ou moins sympa en voiture – mais on s’en fout un peu, on découvre la ville. Arrivés à Hollywood, inutile de préciser le calvaire pour trouver une place à moins de 2 dollars la demi-heure.

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Passons.

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Hollywood boulevard c’est un genre Time Square version L.A. Les tatoueurs se partagent les enseignes avec les marchands-à-touriste-pigeon. Les palmiers sont partout. Peu de locaux, beaucoup d’étrangers, et surtout un festival de mauvais goût.

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En bons touristes on marche sur les étoiles roses et or, on se laisse accoster par les gens déguisés en personnages de dessins animés ; c’est cucu mais rigolo pour un temps. Et puis c’est un bonheur de se balader le dos chauffé par les rayons du soleil, premier soleil, amour de ma vie. Les gens nous souhaitent la bonne année – ah oui, c’est vrai, on change d’année ce soir. D’ailleurs en France c’est déjà bientôt 2013.

On envoie une série de textos pour se trouver un plan pour la nuit – toutes nos connaissances sont touchées par une vague de relouisme et ne sont pas motivées pour quoi que ce soit à part l’appel de leur maison et de leur lit – jeunes, vous avez dit jeunes ? LA MORT. On finit par atterrir chez un de mes potes de photos, Noah, qui nous accueille dans sa famille pour dîner. Je vous laisse quelques photos prises en vol sur le chemin de sa maison.

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Le dîner en famille est très sympa, ça me fait plaisir de découvrir une nouvelle maison – papa, maman, frangin, girlfriend, bébé chien et tout le toutim. Après le repas, les hommes de la famille s’astreigne à une démonstration de jonglage avec des quilles enflammées. Impressionnant.

IMG_8094 JonglageMais Noah aussi est piqué par le relouisme et décide de faire une sieste à rallonge avant de ressortir. Du coup c’est nous qui finissons par être lassés, je me casse avec Khari mater les feux d’artifices sur le haut d’une colline. Qu’on finit par manquer en quasi-totalité. Bref, nouvel an plus raté, tu meurs, mais au moins on s’est bien marrés. On finit par rejoindre notre couchsurfer qui, tout relou qu’il est, n’a pas bougé de la soirée et est parti se coucher sitôt les douze coups de minuit passés.

Winterbreak part 2 – Cap à l’Ouest – Los Angeles

29/12/2012

Me voilà partie pour l’étape numéro deux du périple. Le coeur serré de les abandonner pour six nouveaux longs mois, je quitte mes parents à Plymouth, Massachusetts, et prends la route en direction de l’Ouest.

Départ de Boston. Vol : 6h15. Décalage horaire : 3h.

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Arrivée à l’aéroport autour de 16h, les jambes qui pleurent leur mère d’être restées immobiles si longtemps. Les portes s’ouvrent, j’ouvre les yeux – encore un nouveau monde.

L.A. est une énorme dame. Chaque quartier de la ville est séparé par une distance qui ne peut se parcourir autrement qu’en voiture. La quasi absence de transport en commun oblige les gens à avoir leur bagnole (et la plus grosse sera la mieux). Sauf que les politiques de parking sont un enfer sur tous les plans, en premier lieu financièrement. Comptez un dollar toutes les quinze minutes ; je vous laisse imaginer le prix d’une journée à flâner en ville.

Les rues regorgent de SDF. Les gens trimballent leur vie dans un caddy à côté duquel ils dorment, mangent, se foutent à poil (vu de mes yeux). A la différence de la plupart des SDF français ou est-américains, ils sont étonnamment gentils. La gentillesse semble être une tendance générale ici, mais le ressentir même parmi les plus pauvres, c’est très bizarre. On a été accostés par un type qui voulait quelques centimes, on a fini par récupérer un sac de nourriture « qu’il n’avait pas la place d’emporter » en remerciement – avec un sourire. Si ça, c’est pas le truc le plus bizarre du monde…

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C’est peut être la faute au climat. Poser le pied à L.A., c’est comme l’Italie, c’est comme la France du Sud, comme toutes ces places au soleil :ça stimule la bonne humeur, ça sent les vacances et le bonheur à plein nez. Ça me fait grimper des petites ailes le long du dos. Les arbres autour des maisons sont des palmiers et des plantes grasses, les maisons font des concours de la plus design / bizarre / moderne / je-ressemble-à-une-boîte-de-conserve. 30 décembre 2012, 17 degrés à l’ombre, les natifs se plaignent « on n’a jamais eu un temps aussi HORRIBLE ! ». Haha. Je suis en pull. Dehors. Whatareyoutalkingabout.

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Le soir, on se balade autour de Venice beach, où se trouve la maison de Chris, le couchsurfer qui nous héberge pour quelques jours. Venice beach de nuit vaut ultra le détour. Des petits stores de n’importe quoi s’alignent dans les rues, ambiance Tarantino – Rodriguez : tatoueurs à l’enseigne moto lumineuse et hurlant de la musique hardcore, restos partagés entre les mexicains et les cowboys du dimanche (« welcome to the ranch! »), boutiques de fringues asiat cheap…

Au milieu de la soirée, on s’arrête par hasard pour dîner dans un mexicain pouilleux de Venice Beach. Rodriguez est toujours le maître du lieu. Les néons sautent, les vitres sont couvertes de poussière, le film de kung fu qui passe à la télé minable n’est que hurlements nippons. On passe la porte ; deux motards-à-tatoos nous matent l’air méchant, leur énorme burritos à mi-chemin entre les mains et la bouche. Une quadra botoxée fait son entrée. Enserrée dans un corset noir qui laisse voir la quasi-totalité de sa poitrine et juchée sur des bottes de cuir de 12 cm de talons compensés ornementés de pics, elle emmène ses quatre marmots grassouillets et braillards pour un sympathique dîner en famille. Normal.

En sortant de là, on prend la rue longeant la plage pour notre balade nocturne. Elle est remplie de dormeurs et de caddies et la musique sort de toutes les maisons. On croise un type juché sur son vélo, jambes écartés, l’air hagard. Il a un chapeau de cowboy, des lunettes de soleil (il fait nuit noire), des santiags. Il se brosse les dents.

C’est officiel : j’ai atterri au pays des dingos.

Welcome in Los Angeles.

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Winterbreak part 1 – Washington DC / NYC / Cape Cod

Vendredi 21 décembre 2012, jour de la fin du monde, je me fais chier comme un rat mort dans le bus pour New-York. J’ai quitté Washington à 4h, il est présentement 7h30 et l’arrivée n’est pas prévue avant encore deux heures. Mon estomac se tord de protestation et mes jambes crient leur inconfort. Menfin. Pour un bus à 1 dollar, j’accepte le calvaire.

Ma visite washingtonienne est des plus originales comparée aux autres expériences familiales que j’ai pu avoir aux États-Unis. Drôle d’histoire : j’ai débarqué chez une des très bonnes amies que ma mère s’était faite à la fac et qu’elle n’a pas revue depuis vingt ans. Miléna, canadienne d’origine, mariée à un américain et maman de deux jumeaux de huit ans, est une francophile invétérée qui me parle dans un français parfait teinté d’un chouia d’accent caribou. Elle enseigne le français et les « études québécoises » à Georgetown, une des universités de Washington et mène la famille d’une manière bien différente des autres familles américaines dans lesquelles j’avais pu m’aventurer. Ici, pas de poison télévisuel, l’écran plat du salon est sage et muet, sauf pour les grandes occasions. A la place, des chants de Noël accompagnent les repas (cuisinés, légers, et pris en famille – je me vautre dans le luxe). Le mari, Bob, est l’ombre de sa femme. Timide à l’extrême, il consacre ses journées à son boulot de physicien top secret (il bosse « pour le département d’État », autrement dit quelque chose que tu ne dois pas savoir). A nouveau, l’atmosphère famille me prend aux tripes. L’odeur du pain grillé le matin. La salle de bain miraculeusement toujours propre. Le réveil par les bruits des deux petits qui se préparent pour l’école. Les repas maison. Les mamans qui râlent. Le pied.

Mon royaume pour une famille.

De Washington je n’ai pas vu grand chose. De mes trois jours de visite, j’ai passé le premier dans le musée d’histoire nationale Américaine et le second entre des flâneries autour de Chinatown et la découverte du (super) musée d’Art et de portraits. Quant au troisième, c’était visite de Georgetown avec Miléna. J’ai fait le tour du centre politique en voiture, OUI j’ai vu la maison blanche et OUI le pentagone et OUI le watergate. C’est très blanc, très lisse. Beaucoup de black-à-dreads. A Washington, la politique est partout : dans les stores des musées se vendent des pins de l’inauguration d’Obama, des gourdes à l’effigie des deux principaux partis (imaginez deux secondes une gourde arborant « FIER D’ÊTRE A L’UMP » – la blague). La galerie des présidents, à l’intérieur du musée d’art, vaut le détour. J’ai la chance de tomber sur un papi-guide qui me fait la visite, à moi et à trois autres quidams. Si j’avais oublié que j’étais en Amérique, on a vite fait de me le rappeler. Après deux heures de conférence, alors qu’on achève la visite sur les portraits des Bush, Kennedy, Nixon et cie, première intervention de ma voisine : « combien ils gagnent, les peintres, pour faire les portraits des présidents ? »…

Grmpf.

La maison de Miléna fait très série américaine. Pavillon de banlieue situé à 40 minutes de Washington, grand, lumineux, équipé d’un balcon de bois donnant sur la forêt. Mon premier matin, j’ai été réveillée par les biches. Il paraît qu’elles se pointent souvent, parfois aussi le renard et les raton-laveurs. Les maisons du quartier rivalisent de kitsch dans les décorations de noël : il y a bien sûr les lumières, aux couleurs associées avec plus ou moins de goût, mais aussi les grosses poupées père noël / bonhomme de neige / rennes en plastique gonflable, les traineaux clignotants, les bâtons de sucre blanc et rouge autour des jardins… Tout le voisinage se connaît et s’entraide, la bonne entente est de rigueur. La plupart des enfants du quartier vont dans les mêmes écoles. Sur invitation de Miléna, j’assiste d’ailleurs à l’incroyable prestation de la classe des jumeaux (3rd grade, CE2) qui chantent l’hymne national d’une voix fluette sous l’œil larmoyant des parents. Le spectacle dure trois minutes en tout, les préparatifs une bonne demi-heure, tout comme le retour au calme. Les marmots surexcités courent dans les couloirs ou le drapeau américain flotte à chaque tournant, les parents les félicitent et les gavent de baisers. C’est mignon.

Je quitte bien tôt cette douce famille pour retrouver la mienne, ENFIN, à New-York. Bref étape par Yonkers, au-dessus du Bronx, où je retrouve ma copine cinglée Ariel et sa famille, puis c’est les retrouvailles tant attendues. De cet épisode je retiendrais deux choses : mon père EST CAPABLE d’aimer les immeubles et les starbuck café (« j’aurais jamais cru que j’aurais trouvé un quelconque intérêt à ces tours, mais vraiment, elles ont quelque chose! ») et l’hiver, à New-York, on se les gèle pour de vrai. Mais qu’importe. C’est trop bon de les retrouver. Trop bon et trop court. Juste le temps de voler dans deux trois musées, de leur montrer Central Park et de se paumer dans le métro, de s’engueuler une ou deux fois ; le temps de passer un réveillon de Noël bizarroïde dans le resto de De Niro à Tribeca et de retrouver notre hôtel sans grand-parents, sans oncle, sans messe des familles, sans sapin ni cadeau ; un Noël qui sent pas vraiment Noël mais qui blâmer ? C’est chouette malgré tout. Le temps aussi d’une messe gospel à Harlem le matin du 25, intime, presque pas de touristes, le pied ; et puis le départ pour Wesleyan que j’avais tant besoin de leur montrer. Le temps d’expérimenter les embouteillages monumentaux à la sortie de New-York, de prendre la première sortie après avoir franchi deux km en deux heures, affamés, pour atterrir dans un le premier resto en vue, un chinois miteux et sans chauffage (encore!!!) aux assiettes ENORMES pour des prix dérisoires ; le temps (enfin) de faire route vers le nord en direction de Wes. Mon village de copains tout vide de copains. La neige, leur motel pourri, sans chauffage, en bordure de la route. Le temps d’une série de tours dans le campus, d’une escale dans ma pizzeria, la meilleure du pays, puis du départ vers Cape Cod. Logés dans une super maison de petits vieux, à deux minutes d’une plage blanche, glaciale et magnifique, les promenades, les derniers instants en famille. Et puis on remonte vers Plymouth où je retrouve Khari. Pour notre voyage en Californie.